Samedi dernier au sortir d’une rencontre avec la mouvance présidentielle, le ministre de la Justice et Garde des Sceaux, Me Cheick Sako a annoncé l’ouverture du dialogue à partir du 15 juin prochain. La délégation gouvernementale qui venait de boucler ses consultations avec les deux parties en « conflit », à savoir la mouvance présidentielle et l’opposition, faisait ainsi preuve d’assurance quant à pouvoir ramener les acteurs politiques impliqués dans le processus électoral autour de la table de dialogue. Même si la partie n’est pas gagnée d’avance, pour les résultats probants devant sortir de cette concertation, quand on sait que chacun des camps campe sur sa position, éloignant ainsi toute possibilité de concessions de part et d’autre. A moins qu’un miracle ne se produise.
La délégation gouvernementale a fini sa tournée dans les états-majors de la mouvance et de l’opposition, la semaine dernière. Une tournée de consultation qui a permis à Me Cheick Sako, ministre de la Justice et Garde des Sceaux d’entretenir de façon informelle les opposants et les cadres du RPG-arc-en-ciel autour de la nécessité d’une reprise du dialogue. Avant de prendre langue avec le parti au pouvoir, les émissaires du gouvernement qui étaient constitués en plus du ministre Sako, du ministre délégué à la Défense, maître Abdoul Kabélè Camara et du ministre Secrétaire Général et porte parole de la présidence de la République, Naby Youssouf Kiridi Bangoura, avaient rendu visite à Cellou Dalein Diallo, vendredi dernier. Durant leur rencontre qui s’était déroulée à son QG de la CBG, les deux camps ont discuté des conditions censées conduire vers un dialogue national, dont la tenue permettra de vider les querelles qui existent entre le pouvoir et l’opposition autour du processus électoral. Au sortir de cette réunion de travail, Aboubacar Sylla, porte-parole de l’opposition avait édifié les journalistes sur ce qu’ils se sont dit lors de ce conclave. Le président de l’Union des forces du changement (UFC) avait ainsi indiqué qu’il s’agissait « d’une rencontre informelle destinée à faciliter l’ouverture d’un dialogue structuré et sérieux entre l’opposition et le Pouvoir. Nous avons passé en revue tous les obstacles qui empêchent l’ouverture de ce dialogue, de manière à les lever le plus rapidement possible pour qu’en Guinéens, nous nous retrouvions autour de la table afin de discuter des questions qui nous opposent pour sortir enfin de cette crise politique que traverse notre pays depuis trop longtemps », a-t-il souligné.
Précisant que l’opposition avait mis en avant certaines conditions qu’elle estimait nécessaires pour aller à un dialogue constructif.
Des conditions qui portent sur « l’annulation du calendrier électoral prévoyant la tenue des élections communales pour 2016 et le gèle momentané des activités de la Ceni », selon Aboubacar Sylla.
L’opposition avait aussi porté à l’attention de la mission gouvernementale le cas des détenus issus des rangs des manifestants interpellés et emprisonnés, afin que « leur libération puisse créer les meilleures conditions de sérénité pour que le dialogue puisse se tenir. »
Et pour finir, Aboubacar Sylla avait émis l’espoir que « cette démarche puisse se concrétiser par une ouverture rapide de ce dialogue de manière à ce qu’ils puissent statuer sur le fond des questions qui constituent leurs préoccupations. »
Le lendemain de cette rencontre, c’est la mouvance présidentielle qui a reçu cette délégation au QG de campagne du parti au pouvoir situé à la Minière. Au sortir de cette rencontre, le Garde des Sceaux, Cheick Sako, a déclaré à la presse que les consultations avec les acteurs politiques faisaient partie «d’une démarche informelle permettant de régler à minima certains obstacles qui sont sur le chemin du dialogue afin que cela puisse permettre également que le dialogue se fasse dans la convivialité.»
Il a ensuite ajouté qu’après avoir écouté les deux camps, ils allaient s’atteler à proposer « un ordre du jour » dans les jours à venir pour que le dialogue commence en toute sérénité, à partir de la semaine du 15 juin prochain».
La mouvance présidentielle a pour sa part fait savoir sa position concernant la reprise du dialogue par le biais de l’honorable Saloum Cissé. Celui-ci n’est pas allé du dos de la cuillère en affirmant que « pour ce qui concerne les points sur la Loi, il n’y a pas de tergiversation, nous avons dit qu’il faut appliquer la Loi à ce niveau. Mais tous les points qui peuvent être analysés, améliorés, dans l’intérêt supérieur de la Nation guinéenne, nous sommes prêts à lâcher… à accepter pour que l’opposition et la mouvance puissent aller aux élections sans ambages », a-t-il déclaré. Levant ainsi toute équivoque sur la position du RPG-arc-en-ciel.
Car, cela signifie comme le dira Saloum Cissé que le chronogramme électoral est maintenu. Pour que le vote de la présidentielle ait lieu le 11 octobre. C’est au niveau des élections communales que le parti au pouvoir se dit disposé à discuter afin de voir si « les contraintes internes et externes peuvent permettre de convenir de quelque chose », à en croire Saloum Cissé.
Comme l’a annoncé Cheick Sako, le dialogue pourrait bien s’ouvrir la semaine prochaine. Mais, il faut craindre que la montagne n’accouche là aussi d’une souris. Vu que la mouvance ne veut en aucun cas entendre parler d’une annulation du chronogramme électoral et du gèle des activités de la Ceni. Alors que l’opposition en fait une exigence.
Cellou Dalein Diallo, l’a d’ailleurs rappelé lors de l’assemblée générale hebdomadaire de son parti qui s’est tenu le samedi dernier au siège de son parti à Commandaya. Le chef de file de l’opposition avait accusé le pouvoir de vouloir tripatouiller le scrutin à venir, en corrompant le fichier électoral.
Ce qui à ses yeux justifierait « l’enrôlement massif des mineurs en Haute Guinée et le refus catégorique de la Ceni et des ambassades de l’étranger de faire recenser les Guinéens qui s’y trouvent.»
Ce climat de suspicion qui pollue l’atmosphère politique pourrait difficilement aboutir à un dialogue serein, d’où pourraient sortir des conclusions susceptibles de satisfaire toutes les parties.
Ce qui amène certains observateurs à se demander si les acteurs politiques s’acheminent-ils vers un véritable dialogue ou un jeu de dupes ? Il faudra certainement attendre les prochains jours pour avoir une réponse à cette question. En attendant, le souhait des Guinéens est que le pays sorte de cette crise qui n’a que trop duré.
Mamady Kéita (Le Démocrate)