Amadou Bah Oury, premier vice-premier de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG) n’a pas l’air de mettre de l’eau dans son vin, ce malgré la mise en garde lancée contre sa personne par le président Cellou Dalein Diallo, qui le soupçonne de flirter avec le pouvoir d’Alpha Condé au détriment du parti. C’est un Bah Oury droit dans ses bottes, qui continue de dénoncer la gestion de Dalein, qu’il juge « clanique ».
Maintenant que Monsieur Bah Oury est de retour au pays, que comptez-vous faire pour vous insérer au sein de l’UFDG, après le remue-ménage provoqué par votre accueil ?
Bah Oury : Bon ! Ce n’est pas un remue-ménage, il y a eu un petit groupe parmi les dirigeants du parti qui ont estimé qu’ils peuvent présenter le parti à leurs façons. Mais l’accueil que j’ai reçu a été un accueil très chaleureux, très massif, mobilisé et je remercie tous les militants de l’UFDG et toutes les personnes de bonne volonté qui se sont manifestées, qui se sont mobilisées le 24 janvier pour m’accorder un accueil exceptionnel. Je les remercie et je leur exprime toute ma gratitude et ma reconnaissance.
Vous ne semblez plus cacher vos ambitions qui consisteraient à reprendre la tête du parti. Pensez vous que cette démarche est sans risque pour la cohésion au sein de l’UFDG ?
Rire ! Vous savez pourquoi il y a-t-il alternance dans le pays parce qu’il y a des hommes et des femmes qui estiment à un moment donné qu’ils ont des projets pour leur pays et se battent pour prendre la place qui est déjà occupée par d’autres. C’est une normalité dans un espace démocratique, c’est comme ça que ça doit aller au niveau de l’UFDG. Après un certain nombre d’années de gouvernance dont Cellou Dalein a été le premier responsable, après des élections majeures, deux présidentielles et une législative qui n’ont pas été concluantes en termes de victoire pour l’UFDG, en prenant en compte tout ce qui a été enduré par les militants et sympathisants de l’UFDG durant ces dernières années, il va de soi que nous ne pouvons pas continuer à fermer les yeux sur ces défaites. Il faut tirer les leçons pourquoi ces défaites, faire un bilan rétrospectif, sans complaisance sur tous les aspects de la vie de l’UFDG, sur la gestion du parti, sur le plan politique, sur la gestion du parti au point de vue de ces finances, des moyens. Tout cela nécessite qu’on fasse le bilan, et qu’on s’interroge pourquoi avons-nous échoué durant ces épreuves majeures, pour ne pas avoir à répéter toujours les mêmes fautes. Ce que j’ai réclamé et je continuerai à réclamer pour que l’UFDG reprenne conscience et se remette en question pour avoir des alternatives et des stratégies qui peuvent faire gagner l’UDFG demain.
Que reprochez-vous au juste à Elhadj Cellou et son entourage ?
Vous savez c’est très long pour le dire, mais je pense que la gouvernance de Cellou Dalein c’est avéré au niveau du parti être une gouvernance clanique qui a fait de ce parti un parti le plus important du pays, un parti dont le leadership n’a pas été à la hauteur des ambitions et des espérances de la très grande majorité de ses militants et de ses sympathisants et qui ont fait de sacrifices le plus lourd pour que Elhadj Cellou soit à la tête de la Guinée d’aujourd’hui. Ce n’est pas le cas. Donc il faut qu’on se pose la question pourquoi ce n’est pas le cas, nous avons un grand parti, nous avons des militants mobilisés, nous avons des éléments du parti qui ont mis au service du parti toutes les ressources, pourquoi avons-nous échoué alors ? Donc tout le monde doit être pris en compte dans l’examen critique de cette situation. Et le leadership en définitive semble être le point faible de l’UFDG et donc en tant que responsable de l’UFDG, je ne peux pas me taire et laisser encore un leadership qui s’est avéré pas à la hauteur des espoirs et des attentes de ses militants et du parti dans sa globalité, continuer à conduire le parti dans une dérive qui ne pourrait pas être une situation favorable pour l’expression la plus large des ambitions du parti.
Dans le camp de Dalein on vous soupçonne de jouer le jeu du pouvoir qui consisterait à déstabiliser le parti. Qu’en dites-vous ?
Bon ! Vous savez lorsque j’ai accueilli Cellou Dalein en 2007 avec le doyen Bâ Mamadou et tous les autres responsables de l’UFDG, c’est parce que j’avais à ce moment là le sentiment que Cellou Dalei pouvait être un atout pour l’UFDG. On a eu ce point de vue très important, la contribution à l’élargissement partial du parti a été une réalité, maintenant à l’épreuve de fait pratiquement 9 années maintenant de gestion par Cellou Dalein, des insuffisances sont apparues de manière criarde, les limites de sa possibilité de faire évoluer l’UFDG se sont révélées au jour, nous devons par conséquent tirer les leçons. Pour se dire est-ce que pour l’avenir n’y a t-il pas une autre alternative plus importante pour nous faire gagner et nous faire avancer ?
Vous semblez aujourd’hui vous accommoder de la gouvernance Alpha Condé. Comme si tout était rose.
Non. Je n’ai jamais dit ça. Ceux qui le pensent ont tort, je dis et je répète ce qui est positif dans le cadre de cette dynamique actuelle de la gouvernance actuelle, je dirai que c’est positif, ce qui est mauvais, je ne manquerai pas de m’exprimer clairement et nettement pour dire que cet aspect des choses n’est pas bon pour le pays ; par exemple je dis que Kaléta est bien, je dis que la pose de la pierre pour la construction du barrage Souapiti est très bien parce que le déficit énergétique dont souffre la Guinée est un handicap pour le développement de ce pays et pour disons l’accroissement de la richesse nationale. Que ce soit Monsieur Alpha Condé qui construise le barrage de Souapiti ou une autre personne, dire que ce parce que c’est Alpha Condé, on est opposé à Alpha Condé, on ne peut pas reconnaître que c’est bien. Je pense que ceci montre les limites qu’on a de l’intérêt national, tout ce qui va dans le sens de l’intérêt national et qui est posé par Monsieur Alpha Condé, je dirai que c’est très bien, tout ce qui ira dans le sens ou les intérêts nationaux ne seront pas protégés et défendu et qui seront l’œuvre de la gouvernance d’Alpha Condé dans la phase actuelle, je dirai que ce n’est pas bon, et il faut corriger, je veux une opposition constructive, responsable, ouverte. Pour moi, pour que demain la Guinée soit réellement apaisée avec des institutions stabilisées et une gouvernance civilisée et moderne, il nous faut un contrepouvoir, c’est-à-dire une opposition constructive, efficace, ouverte et responsable si ceux qui pensent autrement, libre à eux de créer des oppositions crypto personnelles, ils en veulent à Alpha Condé à titre de personne, moi je regarde la gouvernance et c’est ce qui m’importe. Si c’est bien je le dirai, si c’est mauvais, je dirai moi j’ai une autre proposition parce que c’est l’intérêt national qui est en jeu au-delà des relations interpersonnelles entre individus.
Quel appel avez-vous à lancer au peuple de Guinée ?
C’est de croire en l’avenir, nous avons intérêt tous quel que soit notre bord politique à ce que la décrispation dans ce pays soit une réalité. Nous avons une situation économique difficile, et une situation sociale ou la pauvreté s’est élargie. Nous n’avons pas le droit de laisser désespérer la très grande majorité des Guinéens, surtout les jeunes qui ne pensent qu’à s’exiler, qu’à aller ailleurs et beaucoup des nôtres sont morts soit au fond de la mer, soit dans le désert, c’est une situation inacceptable en tant que responsable politique de l’UFDG et en tant que responsable citoyen, il est de mon devoir de me battre pour tout ce qui peut conforter une nouvelle réalité positive pour l’intérêt de tous les Guinéens, je dois aller dans ce sens.
J’ai espoir et confiance en l’avenir de la Guinée. Il ne faut pas que les gens désespèrent, il ne faut pas que les gens aient peur. Aux militants de l’UFDG je leur dis n’ayez pas peur, l’UFDG ressortira de cette période de crise, plus forte, plus moderne, plus ouverte et plus en phase avec les intérêts fondamentaux de l’ensemble du peuple guinéen.
Entretien réalisé par Alpha Amadou et Sadjo in l’Indépendant, partenaire de guinee7.com