Comme prévu, l’opposition a tenu ce mercredi à la maison de la presse, une conférence sur la situation économique actuelle de la Guinée. Cellou Dalein et ses pairs ont mis l’occasion à profit pour dénoncer les marchés gré à gré passés par le gouvernement dans le secteur de l’énergie, des mines et du transport. Des pratiques qui selon les opposants ont mis à mal les deniers publics.
C’est le porte-parole de l’opposition Aboubacar Sylla, qui a présenté la situation socioéconomique marquée par « la cherté de la vie et l’insouciance » selon lui du gouvernement, vis-à-vis de la population. « Au lieu de lutter contre la mal gouvernance, l’Etat se contente tout simplement de charger fiscalement le peuple de Guinée, de faire une réforme fiscale non seulement augmenter la TVA, mais à instituer cette TVA sur les denrées de première nécessité, à refuser de diminuer le prix du carburant. Tout ceci pour générer par ces moyens-là des recettes fiscales pour boucher les trous qu’il a creusés par cette mal gouvernance. Pour ça, l’opposition guinéenne a demandé à ce que le prix du carburant soit baissé. Et nous allons continuer à nous inscrire dans cette logique. Parce que notre vocation c’est effectivement faire en sorte que les préoccupations des populations guinéennes soient prises en compte par les gouvernants», a déclaré Aboubacar Sylla.
Poursuivant son intervention, le porte-parole de l’opposition a indiqué avoir des preuves à la main, concernant toutes les accusations portées contre le pouvoir. « Le gouvernement sous l’instigation du Fonds Monétaire International (FMI) a fait un audit. L’audit externe des marchés publics passés en 2013, 2014 et le premier semestre de 2015. Un portefeuille de 68 marchés, sur un portefeuille de 186 contrats, qui ont été transmis et qui porte sur 12 mille 171 milliards desdits marchés. La mission est arrivée à la conclusion que 13% des marchés sont seulement conformes. C’est le rapport qui a été donné par la société ICP que le gouvernement a recruté pour faire ce travail. Tout ce que nous donnons comme information s’appuie sur des documents que nous avons. C’est pour vous dire que c’est la réalité des faits. Ce n’est pas du tout parole d’opposant comme on le dit souvent», s’est défendu l’opposant. Pour le Chef de file de l’opposition, ces marchés gré à gré n’ont permis qu’à l’enrichissement des clans présidentiels.
« L’endettement de l’Etat auprès du trésor a explosé. En 2015, au cours de l’année, il y a eu
un endettement supplémentaire de 1 860 milliards francs guinéens. C’est ce qu’on appelle la planche à billet. Et finalement lorsque la masse monétaire augmente, bien entendu la réserve d’échange s’épuise. Les réserves d’échanges qui étaient à 4 mois d’importation, passent à moins d’un mois d’importation au cours de l’année 2015. Ces marchés gré à gré étaient cachés.
On communique des données erronées ou incomplètes. Le gouvernement ne veut pas que sa responsabilité soit engagée. Donc on se met à accuser Ebola. Vous allez voir aussi pour le premier semestre de cette année, pour la non application du principe de la flexibilité des prix, cela a donné à l’Etat près de 250 milliards de francs guinéens, de surplus par rapport à ce qui était inscrit au budget en recette sur la TSPP.
De plus, c’est ce que tous les consommateurs de carburant ont payé. Alors que ce n’était même pas dans la loi de finance. Donc ça c’est un impôt illégalement prélevé sur la vente des produits pétroliers», a regretté Dalein.
Concernant le retrait de certaines sociétés minières, Cellou Dalein accuse le gouvernement d’être à la base. Car selon lui les responsables sont de mauvais managers. « Les majors étaient là, vous aviez Valé, Rio Tinto, BHP Biliton. Tout le monde voulait le fer guinéen. Le fer guinéen sur le Simandou, c’est le meilleur actuellement dans le monde. Son exploitation exige des infrastructures importantes, ce qui porte le coût à 20 milliards de dollars us. Il était convoité. Rio Tinto pour stabiliser son régime fiscal pour obtenir définitivement son permis, a payé 700 millions de dollars us. Mais après, on est revenu la dessus. On a changé le code minier guinéen. Alpha a dit désormais toute infrastructure qui sera construite ici appartiendra à hauteur de 51 % à la Guinée. Naturellement la conséquence directe c’est que la Guinée paye les 51 %. Ça a tergiversé, il n’y avait pas de visibilité. Chaque fois qu’on avait un accord, on revenait là-dessus. On renégociait. On changeait le code minier avec des effets rétroactifs. Les investisseurs étaient complètement perturbés. Ensuite il y a eu le conflit BSGR. Il y a eu Vale aussi qui est le numéro un mondial du fer. Tout ça c’est par manque de pragmatisme et de réalisme».
Présent à la rencontre, l’ex-ministre de l’Energie a fait des révélations sur la venue de la société ASPERBRAS dans le secteur de l’énergie guinéen. « Pour le marché d’ASPERBRAS, le marché n’a pas été apporté par le fils du président. C’est le président lui-même. Parce
qu’il faut que ça soit clair. Il faut qu’on arrête d’accuser le fils du président à la place du président. ASPERBRAS est venu par l’intermédiaire du président Sassou N’Guesso qui est l’ami personnel du président de la République. Cette entreprise ASPERBRAS était venue
pour faire de la géophysique. Donc dans le cadre des mines, c’est ainsi qu’elle s’est transformée sur place en société d’énergie. C’était déjà la deuxième société qu’on enregistrait après avoir passé le marché avec des Turcs, dans des conditions pas républicaines, qui ont échoué. Et on voulait trouver une entreprise de substitution. Donc cette
entreprise ASPERBRAS qui était venue faire de la géophysique a été sommée de faire de l’énergie. Ils ont fait une première proposition que nous avons refusée. Une seconde proposition qu’on a discutée, ce jour jusqu’entre 20 Heures et 21 Heures. Le lendemain à 09 heure, j’ai été appelé par le président de la République pour me dire il faut qu’on signe. Il faut qu’on sorte de là. Il ne faut pas que vous nous bloqués. Parce qu’on ne sait pas désormais si on est dans le même esprit. Nous on veut avancer et vous, vous retardez. Donc le marché a été passé dans des conditions très obscures», a-t-il souligné.
Ce sont là autant de révélations sur la face cachée de la gouvernance Alpha Condé, qui font froid dans le dos.
Sadjo Diallo