Censure

Caisse Nationale de Sécurité Sociale: Colosse aux pieds d’argile ?

Dans une de nos éditions, nous reconnaissions que Malick Sankhon, le directeur général de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale est une véritable bête politique au service du pouvoir en place. Cependant est-il un bon manager au point de le reconduire par le décret du 11 Août dernier à la tête de cette institution? Etait notre question qui nous a conduits à ouvrir une enquête sur la CNSS.

Récemment, tambour battant, le directeur de la CNSS, M. Malick Sankhon a invité le président Alpha Condé à inaugurer un centre de diagnostic médical qui comprend un laboratoire d’analyses biomédicales équipé d’automates d’hématologie, de biochimie, de bactériologie ; un centre d’imagerie comportant un appareil de radiographie numérique ; un échographe doppler, un mammographe et un scanner de 16 barrettes.

‘‘Un véritable bijou au service d’une large partie de la population qui, pour effectuer certains examens étaient obligés d’aller à l’étranger. Ils peuvent désormais le faire ici et à bas prix’’, nous dit-on au centre de diagnostic de la CNSS. Il parait d’ailleurs que l’existence de ce centre crée la jalousie chez certains promoteurs de cliniques privées qui voient en lui un concurrent venu leur couper le sandwich.

Si tenant compte de l’existant en Guinée, l’importance d’un tel centre est indéniable, il y a cependant des questions à se poser sur son financement et son mode de gestion. Parce qu’il est un bien public.

Selon nos informations, le financement des différents équipements du centre est fait sur la base d’un emprunt que la direction de la CNSS a contracté auprès de l’opérateur économique Indien, M. Ashok Vaswani, patron de Topaz industries.

Ashok aurait fait un prêt d’environ 17 milliards de nos francs à la direction de la CNSS pour assurer le financement des différents équipements médicaux. Les cotisations mensuelles de Topaz industries à la CNSS seraient autour de cinq cent millions de francs guinéens. Le remboursement du prêt se ferait sur la retenue à la source d’une partie, ou tout, de ses cotisations pendant un certain nombre de mois jusqu’à concurrence du montant emprunté.

La supercherie est que la direction de la CNSS a donné la gestion à la GAM (Guinéenne d’Assistance Médicale) sous le contrôle de Dr Chaloub Houssein qui se trouve aussi être le médecin conseil de la CNSS. Il est à ce titre, la personne qui valide les différentes demandes d’examen ; mais aussi-en tant que gestionnaire de la GAM-, la personne qui réalise et fixe les prix des examens. Ne parlez surtout pas de conflit d’intérêts.

Mais le Dr Chaloub que nous avons rencontré dans les locaux se défend d’être le gestionnaire du centre préférant le terme ‘‘coordinateur’’.   Qu’à cela ne tienne.

Les équipements appartenant à la CNSS, installés dans ses locaux, aménagés à ses frais, alimentés en électricité et en eau à ses frais, avec une partie de ses travailleurs, sont exploités par la GAM qui se tape, selon nos informations, 70% des bénéfices contre 30% pour la CNSS ! «Ce ne sont pas des bénéfices, c’est plutôt les recettes qui sont partagées comme telles. Dans les 70% qui reviennent à la GAM, 40% vont aux salaires, 20% aux consommables et seulement 10% constituent le bénéfice, si bénéfice, il y a », rectifie le Dr Chaloub.

Et quand on lui demande à qui appartient la GAM, un peu évasif, il dit qu’elle appartient à un groupe composé de Tunisiens et de Guinéens. Nos sources elles tiennent mordicus que la GAM est une propriété du Dr Chaloub et des en haut de en haut de la Caisse Nationale de Sécurité sociale.

Quid du fonctionnement général de la CNSS ?

Si la réserve de sécurité au Burkina Faso est de huit ans ; 10 ans en Côte d’Ivoire, en Guinée, la CNSS n’a même pas un copeck en réserve. On lorgne le compte attendant une cotisation pour qu’elle soit aussitôt utilisée.

Que dire des travailleurs ? Selon de nombreux témoignages, ils broient du noir. Ils se plaignent de n’avoir jamais bénéficié des différentes augmentations salariales (environ 70%) en faveur des travailleurs guinéens depuis l’avènement d’Alpha Condé au pouvoir.

Rencontré dans un bureau de la CNSS, M. Camara du cabinet d’audit externe à qui nous avons posé une question sur la gestion de l’institution, nous a envoyé paître ! ‘‘Nous voulons vous poser une question sur l’audit de la gestion de la CNSS’’, avons-nous posé comme question. ‘‘Je ne réponds pas à une question dans la rue !’’ répond-il en se dirigeant vers la porte. Nous rétorquons : ‘‘Nous ne sommes pas dans la rue, nous sommes dans un bureau, vous pouvez répondre à notre question ?’’ Sa réponse définitive avant de partir en claquant  la porte : ‘‘Je parle aux gens par rendez-vous !’’

Mais pourquoi a-t-il le nerf à fleur de peau ?  Nous savons que son cabinet recruté pour l’audit externe a fini par  »s’internaliser » en ayant des bureaux au sein même de la CNSS. C’est peut-être une des raisons qui font que l’on sait peu de la gestion de l’institution.

Cependant, selon nos sources, les cotisations mensuelles en faveur de la CNSS s’élèvent à plus de 10 milliards GNF (soit plus de 30 milliards par trimestre). Cependant ses prestations trimestrielles seraient évaluées à environ 8 milliards de GNF. Soit un gap d’environ 20 milliards ! ‘‘Une gestion rigoureuse de cette manne aurait permis de revaloriser les pensions, augmenter le salaire des agents, payer plus de matériels adéquats pour le centre, …ce qui allait réduire les évacuations’’, estime un spécialiste en droit de la sécurité sociale et de la protection sociale que nous avons rencontré.

Ibrahima S. Traoré pour guinee7.com

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