Le vendredi prochain 24 février, le tribunal de Dixinn devra délibérer sur la plainte relative à la décision portant « exclusion de BAH Oury fondateur et 1er Vice-Président de l’UFDG en charge des Relations Extérieures et de la Communication ». Ce nouveau rendez-vous fait suite à quatre autres renvois qui selon les praticiens du droit ne devraient pas aller au delà de trois au risque de s’assimiler à un refus de juger. A cet égard l’Etat doit veiller à la protection juridictionnelle lorsque les délais de procédures s’avèrent anormalement longs afin qu’il ne puisse y avoir un déni de justice. A juste raison, il s’agit bel et bien de l’avenir de l’UFDG qui est en jeu. Cette affaire mérite ainsi un éclairage objectif pour que l’opinion soit correctement informée des enjeux autour de ce litige.
D’abord les faits
· Le jeudi 4 février 2016 en fin d’après-midi, Cellou Dalein convoque une réunion extraordinaire du conseil politique élargie à des députés et à des secrétaires nationaux de l’UFDG. L’ordre de jour portait sur « l’exclusion de BAH Oury de l’UFDG ». Malgré de vaines tentatives d’un certain nombre de personnes d’empêcher la prise d’une telle décision, Cellou Dalein proclame que l’exclusion du fondateur du parti est prise par acclamation. Cet empressement a été dicté pour contrecarrer le retour effectif de l’ancien exilé au sein de l’UFDG. Ce dernier avait une semaine plus tôt, publiquement exprimé sa volonté de se rendre au siège le vendredi 05 février pour assister à la réunion hebdomadaire du Bureau Exécutif et serrer également les mains à ses compagnons de lutte. Ainsi c’est à son insu que la décision de sanction a été prise en violation du principe du contradictoire qui figure dans le règlement intérieur.
· Le vendredi 05 février 2016, BAH Oury se rend au siège à Dixinn-Commandayah pour faire le recours contre la décision de la veille à l’instance du parti conformément au droit « de chaque accusé de se défendre contradictoirement et de faire recours aux organismes supérieurs ou aux instances du parti ». Contre toute attente, une conspiration était ourdie pour l’assassiner afin de l’empêcher de s’adresser directement aux responsables du parti. C’est à cette funeste occasion que le journaliste Mohamed Koula est fauché par la balle qui lui était destinée.
Quels sont les arguments évoqués pour l’exclusion
Ils sont principalement de deux ordres : se soumettre à la discipline telle que pensée et voulue par Cellou Dalein et ensuite faire de lui la source de toute légitimité au sein de l’UFDG en développant une dévotion sur sa personne. Il va s’en dire que cette conception narcissique et stalinienne de la vie politique ne peut pas être acceptée par le combattant pour la cause des droits de l’homme et de la démocratie qu’est BAH Oury depuis sa prime jeunesse. En réalité il s’agit du divorce entre deux visions du monde et de la société, d’un côté la culture autoritaire du parti unique et de l’autre celle de la démocratie et de la liberté. Rétifs à l’existence de débats ouverts et responsables les amis de Cellou Dalein craignaient le retour de BAH Oury qui avait clairement appelé à la rénovation et à la démocratisation de l’UFDG.
L’exclusion viole des dispositions statutaires
Le tribunal de Dixinn devra se prononcer vendredi 24 février sur la conformité « de la décision n°013/UFDG/CAB/2016 portant exclusion de M. BAH Amadou Oury de l’UFDG au regard des statuts et du règlement intérieur de ce parti.
· Négation du principe de la collégialité : les statuts dès 2009 ont institué le principe de la collégialité entre le Président et tous les Vice-Présidents afin de faire émerger une équipe directionnelle efficace. C’est la raison pour laquelle tous ont le même degré de légitimité en étant directement et nominativement élus par l’instance suprême à savoir le congrès national. Le dernier congrès de juillet 2015 a précisé davantage les rôles et la préséance pour éviter des querelles byzantines et infantiles. A cet effet, en son absence du fait de l’exil « BAH Oury a été élu 1er Vice-Président de l’UFDG en charge des relations extérieures et de la communication ». Une résolution expresse additive est adoptée qui indique que le 1er Vice-Président « remplace le Président en cas d’absence ou d’empêchement ». Toutes ses dispositions statutaires vont dans le sens de la collégialité afin d’éviter l’accaparement du parti par une seule personne. Cellou Dalein n’a jamais voulu s’inscrire dans cette logique, c’est pour cela au cours du congrès d’août 2009 il avait milité pour être le seul à être élu par le congrès reléguant ainsi l’élection des vice-présidents par le Bureau Exécutif National qui pourraient être ainsi changés à tout moment comme des pirouettes sans grande légitimité au sein du parti. L’exil de BAH Oury de juillet 2011 à janvier 2016 lui a facilité l’exercice solitaire du pouvoir pour diriger à sa guise l’UFDG. Par conséquent il n’a jamais cherché à abréger d’une manière ou d’une autre l’éloignement physique du n°2 du parti. Tout au contraire, tous les stratagèmes étaient de rigueur pour maintenir ce dernier loin du pays. Son retour d’exil a alors attisé les adversités à son égard.
· Evocation de la discipline pour bâillonner l’esprit démocratique : À tout bout de champ, il est demandé de respecter la discipline pour empêcher des voix discordantes de s’exprimer. Tant que vous applaudissez et vous flattez l’égo du « leader suprême » alors vous êtes dans ses grâces et celles de son clan. Dès que vous avez un point de vue différent, alors ils vous opposent « il faut respecter la discipline du parti » ou « il faut préserver l’unité » comme s’ils sont les seuls dépositaires des valeurs et des idéaux démocratiques qui ont fondé le parti. La démocratie, la concertation libre, le débat démocratique en interne sont avant tout les préalables indispensables pour l’existence d’une discipline collective, partagée et librement consentie. En dehors de cela, la discipline s’assimile à la dictature purement et simplement.
· Usurpation des prérogatives statutaires des instances du parti : Les amis de Cellou Dalein ont bâti leur architecture pour s’accaparer des leviers du parti en faisant du Conseil Politique (un sous ensemble du Bureau Exécutif de 19 à 25 membres) une instance de décision suprême. Or les statuts sont clairs sur le rôle et les attributions de cet organe (article 14-6-2), qui est un organe d’exécution des décisions du Bureau Exécutif National (350 membres). En d’autres termes, le BEN décide et le Conseil Politique applique. Or la décision d’exclusion est prise par le conseil politique qui s’arroge ainsi des pouvoirs qui ne sont pas les siens. Par la suite, pour tenter de corriger cette faute de procédure, Cellou Dalein déclarera qu’il fera signer à postériori la décision par les membres du Bureau Exécutif. Ce procédé illustre la duplicité et le non respect des règles d’une gouvernance correcte.
· Ignorance de la véritable hiérarchie à l’UFDG : Le conseil national qui est composé de l’ensemble des membres du Bureau Exécutif National, des fédérations du parti, du conseil national des jeunes, des femmes et des sages est la hiérarchie du parti. C’est l’instance légitime habilitée à prendre une décision aussi grave que Cellou Dalein a imposé à son conseil politique en violant de bout à bout les dispositions statutaires de l’UFDG.
En conclusion
Nous verrons si le droit sera dit par le tribunal de Dixinn ; ce que par ailleurs nous espérons vivement. En définitive la démocratie et l’Etat de droit ne peuvent prospérer sans une justice juste, transparente et équitable. Le 24 février est une épreuve supplémentaire pour connaître l’état de la justice en Guinée.
Bah Oury