Censure

Prorogation du mandat parlementaire : la faillite de la classe politique guinéenne (Par Alexandre Naïny Bérété)

Dans un décret lu à la télévision nationale, comme on pouvait s’y attendre après l’avis de la cour constitutionnelle, le président de la République prolonge le mandat des députés jusqu’à l’installation d’un nouveau parlement.

Au-delà du débat juridique que cette prolongation suscite, elle met à nue la déliquescence de la classe politique guinéenne qui va de compromis en compromis au détriment des lois de la république. Et le tout cautionner par un président de la république dont il revient constitutionnellement la garantie.

La classe politique, le club des bandits de la république.

Ces dernières années la classe politique guinéenne s’est distinguée par sa léthargie légendaire et son sens d’irresponsabilité qui frise le ridicule. Depuis 2010, la classe politique guinéenne a été incapable de s’entendre pour organiser une élection à date.
On se souvient des vicissitudes qui ont précédé les élections législatives de 2013 avec le bilan que l’on sait, sans d’ailleurs parler du long chemin de croix pour avoir les élections municipales qui ne sont toujours pas terminées. Il faut simplement être en Guinée pour voir une telle réalité.

D’accord en calcul politique, les partis politiques (mouvance et opposition confondues) ont non seulement mis en péril le processus politique qui doit caractériser le fonctionnement normal d’une démocratie, mais ils ont également mis en danger la paix et la quiétude sociale dans le pays. Un tissu social aussi fragile que cyniquement exploité à dessein.
Dans tout État qui se respecte, l’organisation d’une élection ne se négocie pas. Elle est la marque d’un État sérieux et qui inspire confiance auprès de ses partenaires. Mais en Guinée, les politiques foulent au pieds ce principe basique à force d’accords tordus répondant non pas à l’intérêt général mais à des intérêts d’appareils.
Ce qui convient d’appeler désormais le  »syndrome guinéen », cette incapacité ambiante d’organiser une élection à date, elle est non seulement entretenue à dessein mais aussi cautionnée par le président de la république toujours englué dans des calculs de cuisine. Et c’est incontestablement, un point noir qu’on retiendra de sa gouvernance.

Le défi d’une CENI technique pour des élections de confiance

Dans cette décrépitude de la classe politique, la CENI se trouve au centre des intérêts. On pense qu’en ayant des représentants à la commission électorale, on peut partir serein à une élection, et éventuellement la gagner. Les pays africains ont hérité de ce fameux organe chargé des élections à la suite du multipartisme instauré dans les années 90. C’est parce que pouvoir et opposition, personne ne faisant confiance à l’autre pour organiser des élections crédibles.
Mais plus de 20 ans après, ces CENI continuent toujours d’être source de problème et d’instabilité en Afrique. La Guinée a plus que jamais besoin d’une CENI technique pour éviter au pays d’avoir des institutions instables, et des crises gratuites qui coûtent en vie, en temps, en argent mais aussi en crédibilité.

Par Alexandre Naïny BERETE, étudiant à la faculté de Nantes, observateur de la vie politique.

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