Censure

Lettre ouverte à M. Tibou Camara, ancien ministre de la Transition. (De Siaka Barry, Secrétaire Politique de Section, RPG arc-en-ciel)

Tibou Camara

Cher frère, C’est dans un ahurissement profond que les guinéens ont accueilli vos dernières sorties à coups de pamphlets, dont le plus honteusement remarquable est celui en date du 12 novembre 2014, appelant nos compatriotes à la sédition et à l’insurrection contre le régime démocratique ayant à sa tête le Pr Alpha Condé, et que le peuple souverain de Guinée s’est librement choisi le 21 décembre 2010.

D’entrée de jeu, sans détour et sans euphémisme, j’ose affirmer que si la mauvaise foi était une marque de fabrique, vous (Tibou Camara), vous l’auriez brevetée à votre seul profit, et cela, au grand dam des autres apprenti-sorciers qui pullulent dans les rues de Conakry et de Navarre.

Vous introduisez votre papelard par une citation de Gandhi nous enjoignant (s’il y’avait un choix obligatoire à faire) de préférer la violence à la lâcheté, ce qui en soi est une bien noble exhortation ! Mais aussi vraie que peut paraitre cette maxime, je la trouve mal placée et sans objet dans ce galimatias de raisonnements farfelus et d’élucubrations ridicules que vous nous servez dans votre texte. Car, à se pencher de près sur votre propre histoire, je trouve que vous avez toujours été personnellement plus proche de la lâcheté et jamais loin de la violence. Le choix entre ces deux données, serait donc pour vous, un choix cornélien, autant qu’il le serait pour tous ceux qui approuvent vos agissements.

Chers Tibou, comment qualifiez-vous l’obséquiosité qui vous caractérisait dans les années 90 et 2000, lorsque par couardise ou concupiscence (ou les deux), vous encensiez le régime anarchiste de Conté, rampant sous les pieds de ses ministres et commis, poussant l’hagiographie et l’apologie jusqu’à publier votre chef d’œuvre tristement démagogique «Conté, ma politique » ? Soit à cette époque, vous étiez frappé d’une malencontreuse cécité (endémique chez les cadres guinéens en situation de prédation), soit vous faisiez partie de cette escouade de courtisans, de couards et de lâches motivés et guidés par l’appât du gain, dans un système prébendier par excellence.

Oui, à cette époque, vous sembliez prendre le contrepied de ce précepte gandhien, en faisant ostentatoirement le choix de la lâcheté sur celle de la violence. Pourtant, si vous étiez objectifs, et si les intérêts pécuniaires vous laissaient un minimum de lucidité, vous auriez vu à l’époque, sous vos yeux, plusieurs raisons de s’offusquer, de s’indigner et d’appeler à la violence et à la révolution.

En votre qualité de journaliste, sortez-moi un seul appel à l’insurrection contre le régime liberticide et libertaire imposé à la Guinée par vos mentors avec la bénédiction de Conté. Pourtant malgré votre zèle qui frisait la dépersonnalisation, ce régime que vous aduliez, ne manquera pas de vous embastiller le 3 mai 2001 dans une sombre affaire de diffamation vous opposant à un obscur commis de l’état. Eh oui, à cette époque, Tibou le ci-devant vertueux n’avait pas encore assimilé les principes de Gandhi.

Et votre passage éphémère dans le gouvernement mort-né de M. Cellou Dalein Diallo, le 5 avril 2006, n’a trompé personne sur vos accointances souterraines et sur votre propension à servir loyalement les causes injustes d’un régime impopulaire.

Ce qui laisse plus d’un lecteur pantois et qui déclenche l’hilarité chez plusieurs autres, c’est quand vous affirmez sans sourciller, dans un raisonnement acrobatique dont vous seul avez le secret, que « l’Histoire de la Guinée s’est arrêtée depuis qu’Alpha Condé a accédé au pouvoir ». Quel non-sens !!

Non Tibou, l’Histoire de la Guinée ne s’est pas arrêtée à cette date, et pour votre gouverne, elle ne s’arrêtera d’ailleurs jamais ! Elle suit sa «route infinie » comme le disait le défunt président Ahmed Sekou Touré. Ce sont vos propres histoires troubles, rocambolesques et personnelles ayant connu leur apogée sous la transition militaire, qui semblent s’être arrêtées à l’arrivée du Pr Alpha Condé au pouvoir. Or, mon frère, l’Histoire n’a que faire de vos histoires. Elle suit inexorablement et implacablement son cours, ne retenant que les hauts faits et gestes des grands Hommes et jetant dans sa poubelle, les fadaises, historiettes et sornettes des personnes de votre acabit.

Que vous soyez rongés par le stress et le spleen d’un exil auquel vous vous êtes condamnés par vos propres agissements, cela peut se comprendre, mais que vous poussez le narcissisme et le nombrilisme en confondant la glorieuse Histoire du vaillant peuple de Guinée à votre petite histoire qui bat frénétiquement des ailes, au point de vouloir remettre en cause ce qui fonde le socle même de notre démocratie, à savoir la légalité constitutionnelle, je trouve là, que vous franchissez allègrement un dangereux rubicon.

Vous situant dans l’espace et dans le temps, quels arguments sérieux pouvez-vous vendre au peuple de Guinée, apte aujourd’hui à faire déclencher une révolution (objet de vos fantasmes) contre le pouvoir du Pr Alpha Condé ? Ce pouvoir dont la légitimité n’est controversée que par votre haine, n’est-il pas issu de la volonté populaire exprimée de façon souveraine dans les urnes ?

Que vous vous découvriez une vocation journalistique digne de Jean-Paul Marat, en mettant la force de votre plume au service de la violence, cela est un choix personnel, choix dicté par votre situation du moment, dont les fâcheuses incidences ne devraient en aucun cas rejaillir sur le peuple béni de Guinée.

Oui Tibou, vos sournoises intentions ne trompent plus personnes, vous n’êtes pas le Robin des bois que vous voulez présenter au peuple de Guinée, vos masques sont tombés dès lors que vous-mêmes, reconnaissez vouloir « pousser sans attendre Alpha Condé vers la sortie, car  tant qu’il sera à la tête du pays, il n’y aura pas de destin présidentiel pour aucun opposant… » !!! Et le morceau est lâché : « destin présidentiel pour (les) opposants » !!! Voilà ce qui vous fait courir aux quatre vents du globe et qui vous lance dans cet effort sisyphien de déboulonner vaille que vaille ce que le peuple est en train de patiemment bâtir, la démocratie.

Nous, au RPG arc-en-ciel, gardons notre sérénité à toute épreuve, tant que nous restons convaincus d’œuvrer pour le bien du peuple. Notre mandat, nous le tenons de ce peuple souverain de Guinée (que vous appelez aujourd’hui désespérément à la violence), et à l’heure du bilan, « la vérité s’imposera sans violence » pour paraphraser Léon Tolstoï. En attendant, veillons tous sur notre case commune : la Guinée.

Conakry, le 21 novembre 2014

Siaka BARRY

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