Censure

Beyla : Un préfet pas comme les autres

Notre administration territoriale regorge de cadres dont la compétence est mise en doute au regard des interminables exactions qu’ils font subir aux populations. Ils endossent en fait leur part des torts infligés aux citoyens dans un Etat on ne peut plus déliquescent. Seulement il y a lieu de signaler des exceptions, quelques rares cadres font honneur à la fonction qu’ils assument qui est de servir avec abnégation le peuple. Parmi ces exceptions citons cet officier supérieur, préfet à Beyla, le colonel Boh Lanciné Koné.

Le colonel Koné a posé lors de la campagne présidentielle deuxième tour des actes qui attestent son talent de chef. La préfecture de Beyla est peuplée par une majorité de koniankés, une forte minorité de guerzés et par d’autres ethnies en petit nombre (tomas, kissiens, peuls ). Toutes ces populations ont toujours vécu ensemble dans une parfaite harmonie. Les rivalités politiques du scrutin présidentiel sont venues envenimer les différences ethniques dans un terroir globalement acquis à la cause du Rassemblement du Peuple de Guinée (RPG) du professeur Alpha Condé. C’est dans ce contexte explosif que le préfet de Beyla va poser trois actes qui sont tout à son honneur.

Premier acte– A Beyla-centre un matin un exalté se met à circuler à travers la ville avec un microphone à la bouche :« Ecoutez-moi, écoutez-moi, nous allons tous voter ici Alpha, quiconque vote autrement sera sacrifié. Je demande aux peuls et à leurs partisans de pilier bagages avant qu’il  soit trop tard, ils seront tous égorgés le moment venu ». Le préfet informé ordonne à la brigade de gendarmerie de mettre aux arrêts l’exalté, il demande ensuite qu’on lui ampute les pieds afin de l’empêcher de circuler et de proférer des messages incendiaires. L’assistance en chœur sollicite le pardon en faveur du loubard qui, lui-même, jure sur tous les dieux qu’il ne recommencera plus.

Deuxième acte– A Boola, sous-préfecture située à 45 km sur la nationale Beyla-N’Zérékoré, le président du bureau des sages clame à tout vent son appartenance au RPG. Dans les réunions comme dans les causeries, il n’hésite pas à injurier les militants de l’autre bord, à menacer de les chasser. Le préfet est saisi des agissements de ce fameux sage, il débarque à Boola, convoque une assemblée générale des élus au cours de laquelle l’adepte du RPG affiche ostensiblement son militantisme arrogant. Le préfet le démet de ses fonctions séance tenante en ces termes : «  Ma mission de préfet est de préserver l’ordre et la paix dans la préfecture de Beyla, et ton rôle à toi est de m’assister dans ma mission. Malheureusement tu es indigne de ton titre de président des sages, à partir de l’instant tu n’assumeras plus cette responsabilité tant que je serai préfet à Beyla ».

Troisième acte– Sinko est une autre sous-préfecture de Beyla située à 65 km du chef- lieu, là la tension politique monte d’un cran à l’approche de la tenue du second tour du scrutin. La communauté peul se sent menacée dans ses biens et dans sa vie, elle porte plainte chez le préfet. Après une enquête diligentée par ce dernier il s’avère que les menaces sont réelles, le préfet ordonne de fermer les boutiques et magasins des quatre principaux meneurs «  erpégistes » jusqu’après l’élection .Mais voilà que la situation s’envenime, alors le préfet envoie chercher les quatre meneurs et les fait incarcérer à Beyla. Une forte délégation de sages de Sinko débarque pour solliciter la libération des détenus, le préfet ordonne de les enfermer avec les premiers.

Voilà entre autres quelques-uns des actes qui ont permis au colonel Koné de désamorcer un conflit ethnique qui a menacé par trois fois d’éclater. N’eûssent été la clairvoyance et l’intransigeance du colonel, Beyla aurait connu une implosion probablement plus dramatique que celles qu’ont connues Siguiri, Kouroussa et autres préfectures du pays. Bien que fils du terroir, il est originaire de Sinko, cet officier a mis en avant son devoir de chef. Et cela prouve que tout n’est pas pourri dans notre administration territoriale, il y a sûrement des cadres méritants, civils ou militaires, à promouvoir conséquemment parce qu’ils viennent à constituer le noyau de l’administration du changement.

                                                                        In Le Démocrate, partenaire de guinee7.com

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