Censure

‘‘Le partenariat avec l’UFR ne nous empêche pas d’être dans une alliance politique’’, dixit Boubacar Siddighy Diallo, président de l’UMP

Dans cet entretien accordé à notre reporter, le président de l’Union pour le Mouvement Populaire ne fait pas dans la dentelle pour dénoncer l’accord politique et la mal gouvernance qui sévissent dans le pays. Pour Boubacar Siddighy Diallo, Alpha Condé a réussi aussi à taire ses opposants pour s’offrir la présidence de l’Union Africaine.

Comment se porte l’UMP ?

Boubacar Siddighy Diallo : Le parti se porte bien. On est en train de travailler pour continuer l’effort de l’implantation. On avait commencé d’abord à mettre en place la coordination de la Moyenne Guinée, ça a été fait en 2014. Ensuite, on a commencé à mettre en place les structures à Conakry. On a installé des  bureaux à Yimbaya, où il y a notre siège. On a installé à Dixinn, où nous voulons avoir un candidat au niveau des élections communales. Et puis Ratoma, on a déjà quelques bureaux de représentations. Au niveau national, dans chaque région administrative, nous avons installé quelques antennes. Et nous comptons également être présents au niveau de la sous-région ouest-africaine.

Pour l’instant nous sommes à Abidjan. Pour l’Afrique centrale, nous sommes au Cameroun. Nous sommes aussi à Bangkok pour l’Asie. En Europe, nous avons installé une fédération à Bruxelles, deux fédérations en France.

En Allemagne, nous allons valider les deux fédérations dans les mois à venir. Et en Amérique du Nord, c’est moi même qui dois aller installer au Texas, et puis d’autres fédérations à New York et à Washington. Donc, aujourd’hui, nous estimons que le parti se porte bien.

Quelle  est votre position aujourd’hui par rapport à l’UFR ?

Nous restons un parti politique de l’opposition, membre du Front National pour la Défense des Droits des Citoyens, pour l’instant. Depuis les élections présidentielles, nous avons décidé d’accompagner le candidat Sidya Touré. A cet effet, on a fait un document qui stipulait, qu’on partait en partenariat politique jusqu’aux élections communales et locales. Alors tant qu’on ne revient pas sur nos engagements pour annuler ça, nous restons partenaires. Et actuellement, nous sommes en train de travailler  dans une dynamique qui voudrait aussi qu’on mette en place une plateforme de jeunes leaders.

A cet effet, on a travaillé avec la NGC de Thierno Mamadou Bah, avec la PGPD de Mme Yansané Bintou Touré et avec d’autres partis politiques avec lesquels, nous avons discuté et nous nous sommes entendus de créer une plateforme politique et de poser des actes dans le sens de notre vision. Donc, si cela arrivait à se concrétiser, je pense que je mettrai fin ou on va modifier notre partenariat avec l’UFR pour pouvoir être dans un ensemble.

Mais le partenariat avec l’UFR ne nous empêche pas d’être dans une alliance politique. L’UFR, c’est une alliance électorale. Donc, l’alliance politique qu’on va poser doit définir ses lignes. On peut avoir les mêmes démarches, mais à l’arrivée des élections, chacun est libre de poser ses actes en tant que partie prenante ou non au processus.

Quelle lecture faites-vous de la situation économique du pays ?

La situation économique est plus que lamentable. Les réclamations sociales prennent le dessus aussi bien sur le plan de l’éducation que sur le plan syndical. Toutes les centrales syndicales se retrouvent aujourd’hui avec des promesses non tenues, avec des difficultés à protéger même les droits acquis de leurs syndiqués.

Il y a des préavis de grève qui sont déjà préparés. Au niveau de l’emploi, il y a eu beaucoup de régression. Les derniers licenciements de Rio Tinto, c’était à coup de 2 000 travailleurs en une seule fois. Cela s’ajoute aux autres milliers d’emplois perdus dans la même boite. Vous avez la SOTELGUI où il y a plus de 1 500 travailleurs.

Fria, vous avez près ou plus de 1000 travailleurs. Guicopress a perdu plus de 800 travailleurs. Futurlec aussi a perdu des milliers de travailleurs. Donc, quand on fait le cumul de tout ça, on n’est pas loin de doubler le nombre de chômeurs qui existe aujourd’hui par le nombre de ceux qui ont perdu les emplois.

Donc, la situation ne s’est pas améliorée. Les investissements aussi ont régressé parce que l’Etat ne rassure pas. Le gouvernement qui est là, est incapable et inconscient. C’est un gouvernement d’action qui a été déclaré, mais avec des hommes qui ne font que des actions dans la gabegie, dans la fraude et dans la lutte pour s’arracher le marché que d’autres se sont battus pour consolider.

Malgré tous les scandales qui sont déclarés contre des ministres de la République, le chef du gouvernement, il est aussi calme qu’un tonneau. Alors, on ne peut pas dire que le gouvernement pose des actes. C’est le gouvernement, le plus corrompu et le plus irresponsable de l’Afrique.

Aujourd’hui, on ne doit pas s’attendre à une amélioration des conditions, sauf au cas où, le président tirerait les conséquences de son échec par rapport à ce gouvernement. Mais s’il laisse la gabegie continuer, c’est que lui-même, il est démagogue parce qu’il n’aura rien régler pratiquement.

Le point 2 de l’accord paraphé le 12 octobre dernier fait grincer les dents. Quel est votre point de vue ?

Le point 2 viole les principes démocratiques qui consacrent la séparation des pouvoirs. On a créé une nouvelle instance qu’on a appelé le dialogue qui dicte au pouvoir législatif exactement ce qu’il doit écrire, signer, publier et valider. Donc, si on continue cette pratique, on vide l’Assemblée de son contenu.

Les partis politiques sont représentés à l’Assemblée. Au lieu de débattre de la réforme des lois et des textes dans l’Assemblée, ils sortent pour aller dans des instances politiques partagées entre deux grands partis politiques, et quand ils sont d’accord, ils font même signer des ambassadeurs dont les pays ne vont jamais faire des pratiques pareilles, pour vous dire que la forfaiture est même internationale et ils viennent dire à l’Assemblée.

On est convenu à ça, ratifier exactement tel qu’on l’a dit, vous n’avez pas le droit d’amender, ni de discuter. Alors, si cette pratique s’installe, ça veut dire qu’il n’y a plus l’indépendance des pouvoirs les uns vis-à-vis des autres. Ça veut dire que le pouvoir législatif à cesser d’exister, qu’on peut même remettre en cause les fondamentaux de nos textes de lois et qu’il y a 4 institutions républicaines dont la plus éminente est le dialogue.

Si, on en revient à ça, la forme républicaine de l’Etat est partie, l’équilibre et la séparation des pouvoirs est parti, les droits que les citoyens qui sont les droits d’élire leurs représentants à la base s’en va. Dans ce cas, on revient à la case départ. On revient à la loi de Talion où, les plus forts ont raison. Donc, il ne faut pas aller à ça, c’est de la perversion politique.

Mais si ces ainés n’ont pas compris ça, c’est parce qu’ils sont obnubilés par l’appât  du gain. Chacun d’eux sait qu’il peut avoir des quartiers et des districts, donc, il s’en fout que le pays brule ou pas. Aujourd’hui, on va au partage entre ces deux blocs de toutes les circonscriptions qui devraient faire l’objet d’élection. Voilà, ce que le Front est en train de combattre. Si les Guinéens comprennent maintenant, tant mieux, s’ils ne comprennent pas nous serons tous en danger.

Le Front aussi traverse une crise. Vous êtes le médiateur. Alors, où en êtes-vous?

Nous estimons que la médiation pourra passer, dès lors que les acteurs en présence et les antagonistes sont d’accord à aller à l’essentiel. Il faut rappeler que le Front n’a pas été créé pour que les uns espionnent les autres ou pour que les uns jugent les autres. Le Front a été créé pour lutter pour une réclamation qui tienne d’un point  le point 2 du dernier accord. Au-delà de ça, on va trouver l’autre forme de continuer l’existence du Front.

Mais si on n’a même pas atteint notre objectif, les uns commencent à douter des autres ou les uns commencent à juger ou à invectiver les autres, ça veut dire que le Front est en train de s’égarer lui aussi et cet égarement, risque de le fragiliser. L’opposition républicaine et la mouvance n’ont jamais voulu que le Front naisse. Le Front est né dans une difficulté existentielle. Maintenant si on ne se donne pas les mains, si on n’est pas francs et conséquents entre nous, ça veut dire que nous-mêmes nous avons cessé d’être conscients. Mais pour le moment, j’ai le sentiment que la médiation va avancer.

Que pensez-vous de l’arrivée d’Alpha Condé à la tête de l’Union Africaine ?

Nous félicitons le président Alpha Condé pour avoir su quand même rassurer ses pairs africains jusqu’à obtenir la place qui revient à la Guinée. La présidence de l’Union Africaine est une place tournante entre tous les pays membres de cette institution. Mais les mauvais pays sont toujours recalés que si vous n’avez pas su gérer votre famille, votre tour n’arrivera jamais.

On va représenter les autres, pendant que vous, vous n’avez pas eu le droit à votre tour. Alpha Condé a su faire taire son opposition, la clouer et fermer tous les becs et au finish il a dansé avec son principal adversaire.

L’Afrique est contente de voir qu’un leader a pu quand même arriver à ce résultat, en ci-peu de temps, pendant qu’à moins de 3 mois les divergences étaient même criminelles. Donc, il a mérité son poste. Celui qui pense que c’est un coup de chance, moi je dis c’est faux. Il a su jouer et gagner. On doit lui reconnaitre ça. Et ça donne une bonne image à l’extérieur. Lorsque la Guinée a la présidence de l’UA, à chaque fois qu’on parle d’Alpha Condé, on va parler de la Guinée.

Maintenant, si ce qu’il va faire là-bas, ne pas ce qu’on attend de lui, la Guinée pendra aussi un coup. Et s’il compte sur l’actuel gouvernement pour briller à l’Union Africaine, je pense qu’il va plutôt trainer la Guinée dans la boue, ce qui serait dommageable. Et quand ça arrive aussi, on va dénoncer. Mais pour le moment, on lui tire le chapeau pour avoir réussi.

Selon vous, quelles sont les retombées des multiples voyages d’Alpha Condé ?

Il y a des voyages. Il ne va pas poser des actes pour la Guinée. Il peut se permettre certains voyages pour n’avoir aucun acquis pour la Guinée, mais pour lui. Mais, je pense qu’un Chef d’Etat a un budget qui a été voté par l’Assemblée, qui a été mandaté par le peuple. Donc, tout ce que l’Assemblée fait, ça veut dire que le peuple est d’accord. Donc, celui qui bénéficie de ces avantages peut les dépenser au nom du peuple. Alors, je ne vois pas pourquoi les gens vont crier sur lui.

Quel est votre point de vue sur la nomination de Tibou Kamara comme conseiller spécial du président de la République ?

Tibou Kamara est un cadre compétent. Il lui appartiendra comme il l’a fait en 2008, toutes les fois, qu’il n’a pas les mains libres, qu’il accepte aussi de continuer sa coutume d’exprimer sa divergence et de démissionner. Il est parmi les cadres dont j’ai beaucoup de respect  pour son intelligence, surtout sa façon très modeste de gérer l’Etat avec beaucoup d’habileté et beaucoup de maitrise.

Quels sont vos rapports avec l’UFDG ?

C’est un parti politique que je connais, que je respecte et j’en suis un autre peut être qu’ils connaissent aussi bien entendu et qu’ils respectent. Au-delà, on n’a aucune forme de collaboration. Ils n’ont jamais eu besoin de moi pour m’appeler, n’ont plus moi. Mais le leader, c’est un grand frère, on a de très bon rapport. Je n’ai aucun problème particulier pour l’instant.

Quelle analyse faites-vous des propos tenus par Nantou Chérif ?

Les propos de Nantou Chérif ne violent aucune loi de la République dans sa forme. C’est le fond qui viole les lois. Mais le fond est intentionnel. Et en Guinée, il y a la liberté d’expression et d’opinion. Nantou Chérif est libre de dire ce qu’elle a envie de dire dans les proportions qui lui conviennent. Ce ne sont que des intentions. Et la loi ne juge pas, ni ne punit les intentions. Elle a raison.

Moi, je peux vouloir que mon leader soit empereur. Aujourd’hui, vous prenez un militant de l’UFDG, qu’est-ce qu’il veut qu’Elhadj Cellou soit, il va vous dire qu’il veut qu’Elhadj Cellou soit président de la République, alors qu’il n’a pas gagné les élections. Est-ce que ça fait qu’on est le droit de le critiquer ou de le poursuivre pour l’avoir dit.

Mais ce que Nantou ne sait pas, ce que le peuple même n’a plus le droit de transformer un troisième mandat. Il a perdu cette faculté, dès lors  qu’il a dit que tout ce qui parle de ça, ne peut pas être révisé. Et le peuple ne peut pas se dédire. Donc, la constitution qui s’impose à tout le monde a défini ce qui peut être changé et ce qui ne peut pas être changé. Donc, il suffit juste que les bons intellectuels du RPG appellent Hadja Nantou pour lui expliquer.

Entretien réalisé par Sadjo Diallo

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