Censure

Projet ENA : La nébuleuse

Avant de publier, il y a une semaine, un article du journal canadien, La Presse, nous avions fait un ‘‘chapeau’’ intitulé «Ils profitent du projet ENA pour demander l’asile au Canada : Le ministre de la Fonction publique interpellé »

Dans ce ‘‘chapeau’’, nous rappelions que des personnes ont profité de l’un des projets phares du président Alpha Condé, l’Ecole Nationale d’Administration (ENA), pour demander l’asile au Canada.

Avant d’ajouter : « On sait que le ministre de la Fonction publique, M. Sékou Kourouma, a activement participé à ce projet. Selon notre enquête préliminaire les dossiers des candidats ont été envoyés par son ministère à l’OIM –le Canada n’ayant pas une Ambassade en Guinée- pour les visas. Pire, le même ministère avait imposé des noms de candidats qui n’avaient pas été retenus au départ par les experts canadiens qui ont procédé à l’évaluation. C’est pourquoi à notre avis, le ministre Sékou Kourouma qui était lui-même retenu comme apprenant-nous dit-on, doit faire des explications autour de cette affaire qui n’honore pas la Guinée et qui risque de compromettre ce grand projet.»

Il semble que par ces mots, nous avons commis tous les péchés d’Israël. En tout cas le ministère de la Fonction publique qui s’est fendu d’un « droit de réponse », a continué sa réplique en saisissant la HAC contre nous. C’est son droit.

Tout comme c’est notre droit de savoir comment un projet public a été piloté ; et notre devoir est de rendre compte à la population guinéenne après avoir su.

En lisant ce qui fait lieu de droit de réponse et les griefs portés contre nous à la HAC, on se rend compte que ce qui offusque le ministre de la Fonction publique c’est bien ce passage: « Le même ministère avait imposé des noms de candidats qui n’avaient pas été retenus au départ par les experts canadiens qui ont procédé à l’évaluation. »

A propos, voici l’explication du ministère : « La sélection des vacataires de l’ENA s’est déroulée sur la base d’un appel à candidature présidé par un jury composé entre autres de recteurs des Universités koffi Annan et de Sonfonia, de l’Institut Supérieur de formation à distance, du chef de mission de l’ENAP du Québec, d’un Conseiller du Ministère de l’enseignement supérieur, et d’un haut cadre du Ministère du plan ;

–         Sur 325 candidatures enregistrées par le jury, 245 n’obéissaient pas aux critères exigés pour être formateurs à l’ENA. Les 80 autres ont été classés bons et moins bons. Sur les 40 dossiers jugés bons, 39 ont subis des entrevues les 5, 6, et 7 novembre 2013. Au terme de l’exercice, seize (16) candidats ayant obtenus un score moyen supérieur à 70/100 ont été retenus d’après le procès-verbal du 8 novembre 2013.» 

Nous confirmons que 16 candidats ont été retenus suite à cet examen. La décision no 1086 du Haut Commissariat à la Réforme de l’Etat et la Modernisation de l’Administration en fait foi. Et cette décision précise que « les candidats dont les noms suivent, ayant satisfait aux conditions de recrutement, sont jugés aptes à exercer les fonctions de formateurs vacataires à l’Ecole Nationale d’Administration (ENA) de Guinée et classés par ordre de mérite ».

Cette décision signée le 20 décembre 2013, Par Sékou Kourouma, à l’époque Haut Commissaire à la Réforme de l’Etat et la Modernisation de l’Administration, se termine par cette annonce : « Les intéressés sont conviés à suivre un programme de formation des formateurs de dix (10) semaines à l’Ecole Nationale d’Administration Publique de Québec/Canada à partir de mars 2014. »

Comme par tour de magie, à peu près un mois après, le Haut Commissariat à la Réforme de l’Etat et la Modernisation de l’Administration, signe la décision no 1107 avec cette mention : « les candidats dont les noms suivent, ayant satisfait aux conditions de recrutement, sont jugés aptes à exercer les fonctions de formateurs vacataires à l’Ecole Nationale d’Administration (ENA) de Guinée et classés par ordre alphabétique (ce n’est plus par ordre de mérite, NDLR). » L’autre grande nouveauté de cette liste est que de 16 personnes admises sur la première liste, on se retrouve avec 20 ! Et c’est ce que nous dénonçons.

Mais lisons les arguments du ministère pour justifier cette ‘‘prouesse’’ : « Une seconde série d’entrevue s’est déroulée le 9 janvier 2014 afin de sélectionner quatre (4) autres formateurs sur la base des mêmes critères de sélection. En cas de désistement d’un ou de plusieurs des candidats retenus, le jury a identifié cinq (5) candidats jugés aptes à remplacer un candidat retenu se désistant. » Les arguments tirés par les cheveux, font forcément mal à la tête !

Voyons. Le ministère cette fois-ci n’énumère pas les noms des membres de jury. Il estime seulement que c’est sur la base « des mêmes critères de sélection ». Question : pourquoi alors il n’a pas pris les noms qui suivaient le 16ème, c’est-à-dire le 17ème, 18ème, 19ème, et le 20ème qui sont des « réservistes » naturels d’un concours classé par ordre de mérite?

La totale ? L’ordre de mission avec comme objet « stage de formation » établi pour la période du 13 octobre au 12 décembre 2014 comporte 25 noms !

D’une liste de 16, nous avons eu 20, puis 25 ! Sans aucune explication officielle. N’avons-nous pas le droit de nous interroger, et interpeller le ministre de la Fonction publique ?

Ibrahima S. Traoré

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